Rôle du traitement diététique dans la MRC

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Une étude menée par Pr. Kalantar-Zadeh et Pr. Fouque (2017) a démontré par des essais cliniques que les régimes à faible teneur en protéines atténuaient les symptômes de l'urémie et maintenaient la vitesse de filtration glomérulaire (VFG), retardant efficacement la mise en place de la dialyse chez les patients atteints de la maladie rénale chronique (MRC).

Les régimes pauvres en protéines entraînent d'abord une diminution progressive du VFG, suivie d'une diminution des dommages glomérulaires et d'une stabilisation à long terme. En plus de stabiliser le VFG, le régime pauvre en protéines (0,6-0,8g/kg/jour) atténue la protéinurie chez les adultes atteints d'insuffisance rénale modérée à avancée (VFG, <45 ml par minute par 1,73 m2 de surface corporelle).

Le tableau ci-dessous (Tableau 1) présente les effets des régimes pauvres en protéines sur : la protéinurie, l'urémie, l'acidose métabolique, l'équilibre minérale et osseux, le gaspillage protéino-énergétique, la santé cardiovasculaire et métabolique, le contrôle glycémique et la réponse insulinique, la qualité de vie, la mortalité, et le microbiome.

 

 

Constante mesurée Avantages Risques Commentaires
Progression de la MRC Réduction de la pression intra glomérulaire Baisse initiale à court terme du DFG Résultats non concluants dans l'étude MDRD, mais effet mesuré dans les méta-analyses
Protéunirie Effet anti protéinurique LPD est contraire à l'idée que l'apport en protéines doit être augmenté Certaines données suggèrent un effet encore plus important peut être obtenu avec un apport quotidien en protéines <0.6 g/kg
Urémie Diminution de l'urémie Si l'apport calorique n'est pas maintenu, un gaspillage protéino énergétique peut être entrainé Les patients à risque fort de gaspillage protéino énergétique peuvent bénéficier de suppléments (par exemple, céto analogues)
Acidose Métabolique Diminution de la production des ions hydrogène Le besoin > à 50% de protéines à haute valeur biologique peut entraîner une consommation plus élevée d'aliments non végétaux qui sont acidogènes Une teneur > 50% de protéines à haute valeur biologique est recommandée et le reste de protéines peut provenir d'aliments végétaux
Equilibre minéral et osseux Le faible apport en phosphore du régime hypoprotéiné améliore le déséquilibre minéral et osseux Une teneur en calcium plus élevée dans certains compléments (cétoacides) peut augmenter la charge en calcium Des améliorations de la santé osseuse sont possibles en atténuant l'acidose
Gaspillage protéino énergétique L'amélioration de l'hypoalbuminémie chez les patients avec protéinurie peut aider à neutraliser les composés inflammatoires Une perte de poids peut survenir; Bien qu'un apport plus élevé en protéines soit recommandé, le régime hypoprotidique peut être poursuivi après le début de l'hémodialyse (trois fois par semaine) La moitié des protéines alimentaires doivent être des protéines à haute valeur biologique
Contrôle glycémique et réponse insulinique Amélioration de la résistance à l'insuline Avec un LPD ou un VLPD, un apport plus élevé en glucides et en graisses (pour atteindre 30–35 kcal / kg / jour) favorise le contrôle glycémique La prévention des épisodes hypoglycémiques doit être renforcée
Santé cardio vasculaire et métabolique Un apport plus faible en protéines, associé à une consommation réduite en sel et en graisses saturées, peut être moins athérogène, notamment grâce à la consommation plus élevée d'aliments végétaux Un apport plus élevé en graisses alimentaires (pour atteindre 30 à 35 kcal / kg / jour) peut nuire à l'objectif d'une alimentation saine pour le cœur : veillez à favoriser des graisses insaturées Une proportion plus élevée de graisses insaturées et de glucides complexes est recommandée
Qualité de vie et adhérence au traitement Amélioration de la perception de la thérapie nutritionnelle, centrée sur le patient, en recherche de conseils diététiques Challenge lié à l'observance au traitement ; lassitude au traitement, faible appétence, écoute des envies.. Recommander des recettes et des idées créatives pour impliquer les patients
Mortalité Un régime à faible teneur en protéines peuvent retarder la dialyse de plusieurs mois sans augmenter la mortalité Avec une teneur en protéines de 0,6 à 0,8 g / kg / jour, pas de risque d'augmentation de la mortalité sauf si un gaspillage protéino énergétique émerge et n'est pas corrigé Envisager des compléments ou d'autres stratégies correctives lorsqu'une perte protéino énergétique est suspectée ou diagnostiquée
Gestion de l'hypertension Amélioration du contrôle de la tension artérielle La réduction de la pression artérielle est probablement le résultat d'une diminution de la consommation de sel associée au régime hypoprotidique Attention à l'apport plus élevé en potassium provenant d'aliments végétaux
Réduction des toxines urémiques grâce à l'amélioration du profil du microbiome peut maintenir la fonction rénale résiduelle Profil amélioré, obtenu par la réduction de la production de toxines urémiques Possibilité de développer un profil de microbiome défavorable ne peut être exclue L'urémie elle-même peut conduire à un microbiome défavorable
Tableau 1.  Avantages et risques potentiels d'un régime pauvre en protéine pour le traitement diététique de la MRC

D'après 12 études de cohortes d'observation, Mathew et ses collaborateurs (2018) démontrent que l'hémodialyse incrémentale (HD, deux fois par semaine) peut préserver la fonction rénale résiduelle (FRR) et diminuer les fistules artério-veineuses et le besoin de greffe chez les patients atteints d'IRC. De plus, le régime pauvre en protéines la (0,6-0,8g/kg/jour) les jours sans dialyse peut arrêter le déclin de la FRR chez certains patients HD. Par exemple, dans une étude de cohorte prospective, 38 patients ont reçu un régime à très faible teneur en protéines.

Caria et coll. (2014) ont réalisé une étude prospective multicentrique et prospective contrôlée sur des patients atteints d'IRC sous dialyse pendant 6 à 12 mois, avec un suivi des taux d'hospitalisation et de survie pendant 24 mois. Parmi les 68 patients, 38 ont commencé un programme de dialyse avec une thérapie nutritionnelle combinée (CDDP) et 30 ont choisi l'hémodialyse standard trois fois par semaine (THD). La perte de VFG était de 0,13 mL/min/mois dans le groupe CDDP, comparativement à 1,53 mL/min/mois dans le groupe THD. Au cours du suivi après 24 mois, le taux de survie du groupe CDDP était de 95 %, contre 87 % et les hospitalisations étaient de 3,7 jours/patient et de 6,1 jours/patient pour le CDDP et la THD respectivement.

Dans une étude méthodique et une méta-analyse portant sur 16 essais contrôlés sur 2 771 patients (médiane : 84 patients/étude) en thérapie nutritionnelle dans l'IRC (stades 3 à 5), Rhee et coll. (2018) ont comparé les régimes avec un apport protéique >0,8g/kg/jour et un apport limité en protéines <0,6g/kg/jour. D'après les données regroupées, les régimes dont l'apport en protéines était plus faible ont entraîné des taux sériques plus élevés de bicarbonate, des taux de phosphate plus faibles, une azotémie plus faible, une progression plus faible vers l'insuffisance rénale terminale et une mortalité plus faible. Les régimes présentant une restriction supplémentaire de l'apport en protéines (<0,4g/kg/jour) présentaient une meilleure préservation de la fonction rénale et une progression encore plus faible vers l'insuffisance rénale terminale.

 

Reference

  1. Kalantar-Zadeh, K., and Fouque, D. Nutritional Management of Chronic Kidney Disease. New England 
  2. Journal of Medicine, 2017; 377:1765-76.
  3. Cupisti, A., Brunori, G., Raffaele Di Iorio, B., et al. Nutritional treatment of advanced CKD: twenty   consensus statements. Journal of Nephrology, 2018; https://doi/org/10.1007/s40620-018-0497-z.
  4. Mathew, A.T., Obi, Y., Rhee, C.M., et al. Incremental dialysis for preserving residual kidney function – Does one size fit all when initiating dialysis? Seminars in Dialysis, 2018; 31:343-352.
  5. Caria, S. Cupisti, A., Sau, G., et al. The incremental treatment of ESRD: a low-protein diet combined with  weekly hemodialysis may be beneficial for selected patients. BMC Nephrology, 2014; 15: 172.
  6. Rhee, C.M., Ahmadi, S.F., Kovesdy, C.P., et al. Low-protein diet for conservative management of chronic kidney disease: a systematic review and meta-analysis of controlled trials. Journal of Cachexia, Sarcopenia and   Muscle, 2018; 9: 235-245.